Bettina Flores partage son avis sur la crise politique française actuelle dans cette nouvelle chronique. Elle aborde le désarroi face à l’imbroglio des élections législatives, la montée inquiétante de l’extrême-droite, ainsi que les tensions internes au Nouveau Front Populaire.
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Le nouveau Parlement ou la chambre introuvable…
Les élections législatives anticipées provoquées par Emmanuel Macron ont bien eu le résultat escompté : aucune majorité absolue au Parlement ne se dégage, les trois forces politiques en lice ont fait match nul…
L’extrême-droite, le Rassemblement National (RN), malgré ses onze millions de voix au premier tour, arrive en troisième position. Les alliances de la carpe et du lapin au second tour ont eu raison de son avancée… Dans une espèce de sursaut démocratique, des électeurs ont choisi La France Insoumise (LFI) pour faire bloc contre l’extrême-droite et Renaissance, le parti macroniste, arrivé en deuxième position, mais pas par affinité ou goût particulier pour les forces de gauche rassemblées sous le Nouveau Front Populaire (NFP). Ce dernier revendique la victoire, le choix d’un Premier ministre et d’un gouvernement. Mais, déjà les loups se dévorent entre eux… les insoumis, les socialistes, les communistes, les verts, des semaines après les élections, sont incapables de se mettre d’accord sur un candidat, qui de toute façon en dépit de la majorité relative du NFP, sera refusé par E. Macron.
Une chambre introuvable à la française
Ce nouveau Parlement est une sorte de « chambre introuvable » comme en 1815 juste après la chute de Napoléon 1er, sous la Seconde Restauration quand les 14 et 22 août 1815, une majorité de royalistes a remporté l’élection à la première législature de la chambre des députés, à la moyenne d’âge très jeune pour l’époque, quarante-cinq ans.
Ils ont instauré la Terreur blanche, légalisée par la chambre et ses lois répressives qui échappaient à l’influence du roi et du gouvernement, d’où une chambre de députés qualifiée de « plus royaliste que le roi » par Louis XVIII lui-même qui n’aurait pu rêver mieux pour son règne, tant elle était favorable à son trône.
Instaurée le 7 octobre 1815, cette chambre introuvable, à l’orientation contre-révolutionnaire, réactionnaire, fut suspendue en avril 1816, dissoute le 5 septembre et n’a duré que six mois…
Une période de répression et d’épuration
Constituée d’une majorité de bourgeois, des hommes jeunes, nouveaux en politique, et de vieux émigrés désireux de revenir à l’Ancien Régime, elle fut une période d’épuration et de terreur blanche légale qui opposaient les Bonapartistes et les anciens révolutionnaires dans l’Ouest vendéen et le Midi, les catholiques et les protestants.
Des lois très répressives furent votées, loi de sûreté générale, loi sur les discours et les écrits séditieux, rétablissement des cours prévôtales (juridictions d’exception confiées à des militaires) et loi d’amnistie malgré les nombreux assassinats politiques.
La grande majorité de ces députés avait soif d’ordre, un esprit de vengeance qui attisait les haines et la colère. Sans projet politique cohérent, les ultras ne réussirent pas à reconquérir l’opinion et la chambre est vite devenue ingouvernable, à l’image de notre pays actuellement.
Entre ordre et désordre sous Macron
Je ne sais pas s’il faut parler de chambre introuvable ou de Premier ministre introuvable… mais cette soif d’ordre, ce virage réactionnaire, la poussée des « ultras », le besoin de sécurité, les lois répressives votées ces dernières années, y ressemblent étrangement.
Emmanuel Macron dans sa lettre aux Français ce 10 juillet, se veut soi-disant le garant des « forces républicaines qui représentent une majorité absolue », demande à l’ensemble des forces politiques « de bâtir une majorité solide, nécessairement plurielle », parle de « sens de la concorde », de « parlementarisme », de « travailler ensemble », « d’état de droit », « d’une orientation européenne » et de « défense de l’indépendance française ». On croit rêver…
Pendant le second tour, il est parti aux États-Unis chuchoter à l’oreille d’un président – sénile (c’est pas moi qui le dis) – et recevoir les ordres de ses amis de l’OTAN. Son ex Première ministre qui a utilisé vingt-trois fois le 49.3 en dix-huit mois, en moyenne plus d’un par mois, semble avoir fait preuve d’un grand parlementarisme démocratique en effet…
Des contradictions et une opposition complice
Un miracle est arrivé : Ursula von der Leyen est réélue présidente de la commission européenne. Manon Aubry de LFI après avoir crié sur tous les réseaux sociaux qu’elle s’opposait à la réélection de la « Gorgone« , a été vue sur maintes photos en train de faire la bise et féliciter la présidente réélue.
Ce n’est même plus de l’opposition contrôlée, c’est carrément de l’opposition complice… On se rappelle qu’avec sa copine, les deux s’étaient trompées deux fois de bouton pour la reconduction du passe sanitaire et autre…
Vers une gouvernance d’exception ?
Après que la démission du Premier ministre Gabriel Attal ait été refusée puis (récemment) acceptée, il est maintenu au pouvoir pour soi-disant ne gérer que les affaires courantes et plus particulièrement l’organisation des Jeux Olympiques.
Le centre de Paris, le long de la Seine est devenue une prison à ciel ouvert, la circulation arrêtée, déviée, des barrières et des murs d’acier dressés le long des rues et des berges, un QR code exigé à chaque pas comme au bon vieux temps du Covid…
La soif d’ordre, comme je vous disais, la répression des libertés toujours plus grande au nom d’un tout sécuritaire censé rassurer mais qui n’existe pas, est toujours en marche…
Aussi, le virage à droite de la droite, pour ne pas dire à l’extrême-droite qu’a pris le pays, va tout à fait dans le sens de ce gouvernement réactionnaire, liberticide et sert ses intérêts.
La lutte du pouvoir en place contre l’extrême-droite, le RN, n’est qu’une Commedia dell’arte faite pour brouiller les pistes et faire croire à une démocratie qui n’existe plus.
Amélie Oudéa-Castéra et Anne Hidalgo : le show dans la Seine pour les JO
Pendant ce temps l’ex ministre des Sports et des Jeux Olympiques, Amélie Oudéa-Castéra et la maire de Paris, Anne Hidalgo, font leur show dans la Seine pour nous démontrer que l’eau est propre et safe. Très peu pour moi, on dira… Savoir nager en eaux troubles requiert une certaine expérience et comporte de grands risques… (« La visibilité sous l’eau est de moins d’un mètre », un sapeur pompier de Paris, France Info, 11 juillet 2024). La dépollution de la Seine aura tout de même coûté la bagatelle de 1,4 milliard d’euros (cf. ma chronique sur les JO https://lapressedusoir.fr/du-pain-des-dieux-et-des-jeux/ 22 septembre 2023). Gageons qu’une fois les Jeux Olympiques passés, les QR codes seront maintenus et même étendus, l’enfer sur terre pour les Parisiens prolongé ad vitam aeternam… Appeler à la concorde nationale, quand tous les partis politiques ou presque votaient les mesures sanitaires pour le bonheur de tous… même si certains ont pu changer par la suite très opportunément leur fusil d’épaule, est devenu une habitude, un tic de langage.
L’avenir incertain de la France
Alors une chambre introuvable, cette nouvelle assemblée législative ? Une fois les jeux et les congés d’été passés, nous le saurons très vite. Espérons que la rentrée de septembre ne se résumera pas à l’activation de l’article 16 de la Constitution qui donne les pleins pouvoirs au président de la République du fait d’une chambre et d’un Premier ministre « introuvables », d’un pays ingouvernable, à la mise sous tutelle de la France par le FMI pour cause de dette abyssale – Jeux Olympiques obligent entre autres – et à un scénario à la grecque qui semble se profiler à l’horizon…
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Le nouveau Parlement ou la chambre introuvable…
©Bettina Flores, le 22 juillet 2024.
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