« Évanouie », le premier roman de Mathilde de Télossie : une œuvre remarquable qui sublime l’art de l’écriture.
Nous avons le plaisir de recevoir Mathilde de Télossie pour une interview exclusive à l’occasion de la publication de son premier roman, ‘Évanouie‘, aux éditions Passiflore.
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Qui êtes-vous réellement ?
Je m’appelle Mathilde, de Télossie est mon nom de plume. C’est l’anagramme de « des étoiles ». J’ai puisé ce nom dans mon amour pour le ciel nocturne, pour les constellations et les mythes grecs que celles-ci renferment. C’est par l’observation des étoiles que sont nées mes trois grandes passions : la littérature, la philosophie et la linguistique.
Je suis également artiste peintre pastelliste et pratique l’art du pastel depuis plusieurs années.
Pourquoi vous lancer dans l’écriture d’un livre et pourquoi maintenant ? Y a-t-il des expériences personnelles ou des moments de votre vie qui ont influencé la création de ce livre en particulier ?
J’ai toujours voulu être écrivaine. Ma passion pour l’écriture est née en même temps que mon apprentissage de la lecture sur les bancs du CP.
Me « lancer dans l’écriture d’un livre » est donc un objectif depuis que je suis enfant. J’ai toujours écrit, des poèmes, des manuscrits de roman, de nouvelles…
Évanouie est le texte qui me semblait le plus aboutit, alors je l’ai proposé à la publication.
Je suis titulaire d’un master recherche en philosophie et cette discipline d’une manière générale influence grandement mon travail d’écrivain. Tout en restant dans une optique purement fictionnelle, je cherche à éveiller chez le lecteur une forme de questionnement intérieur.
Mon roman est un roman surréaliste qui parle d’oubli. Il raconte l’histoire d’une femme, prénommée Évanouie, qui, du jour au lendemain, disparait des souvenirs de son entourage comme si elle n’avait jamais existé.
En travaillant sur le thème de l’oubli, notamment avec l’aide des écrits de Nietzsche, j’ai réalisé que l’oubli pouvait être à la fois quelque chose de destructeur, mais aussi, de libérateur. Ce paradoxe m’a intrigué, et j’ai construit une histoire autour de lui.
Votre livre aborde la dichotomie entre une vie apparemment parfaite et une réalité dissimulée. Comment avez-vous décidé d’aborder ces thèmes et quel message cherchiez-vous à transmettre aux lecteurs ? Y a-t-il des aspects spécifiques de notre société contemporaine qui vous ont influencée ?
Je ne me sens pas particulièrement influencée par la société contemporaine. Je cherche au contraire à me focaliser sur ce qui est « de tout temps et de tout lieu ». Le thème de la disparition, de l’angoisse de la perte, du désir d’ailleurs, sont des thèmes universels et je suis très attachée à cette idée d’universalité et d’intemporalité du propos.
Avoir une vie « parfaite » est souvent synonyme d’avoir une « vie stable ». Or, le problème de l’hyper stabilité dans le quotidien est que cela peut se transformer en routine mortifère.
Le bouillonnement intérieur de mon héroïne est son moyen à elle d’avoir un petit sentiment de mouvement, dans cette vie trop stable. C’est cette dichotomie entre apparences stables / profondeurs chaotiques, que j’ai aimé travailler.
S’il y avait un message que je devais faire passer au lecteur par ce roman singulier, ce serait de toujours veiller à laisser entrouvert une petite fenêtre vers le chaos et l’inconnu, au risque sinon de pourrir petit à petit de l’intérieur.
Vous avez réussi à créer une tonalité à la fois drôle, simple et contemporaine. Pourriez-vous nous expliquer votre approche narrative pour atteindre cet équilibre ?
Je travaille énormément mes brouillons. Tant que tout n’est pas clair et distinct dans ma tête, je ne me lance pas dans l’écriture.
Une fois que je commence à écrire, je réécris plusieurs fois avec une forme d’acharnement. Il faut énormément travailler pour donner l’apparence du simple. Quant à l’aspect drôle, j’imagine que c’est moi qui transparais dans mon récit…
J’ai tendance à manier un peu trop le sarcasme et parfois, j’échappe moi-même à mon contrôle, même si ce récit est écrit sous une narration à la 3e personne.
Quelles sont vos réflexions sur l’évolution de la littérature et de l’écriture à l’ère numérique et dans notre monde en constante évolution ?
Je ne suis pas inquiète, contrairement à beaucoup. Je pense que lorsque l’on ouvre un livre, on va chercher ce qui nous rend profondément humains, c’est-à-dire l’erreur et la faille. Et s’il y a bien deux constantes chez l’homme, c’est sa capacité à commettre des erreurs et les innombrables failles qu’ils portent en lui. Donc je crois que la littérature se portera toujours bien.
Au-delà de votre propre travail, comment percevez-vous le rôle de la littérature dans notre société moderne ? Y a-t-il un rôle particulier que vous aimeriez voir la littérature jouer davantage ?
Je souhaiterais qu’on apprenne très tôt aux enfants dans le milieu scolaire et parascolaire à réfléchir et à écrire. Au-delà de l’aspect cathartique de l’écriture, je pense fondamentalement qu’il n’y a pas d’âge pour apprendre à ordonner sa pensée, à construire une histoire et à stimuler son imaginaire.
Selon moi, c’est la clé de l’autonomie, de la compréhension de nos émotions, et de la connaissance de soi-même et des autres. On apprend aux enfants à lire et à ne pas faire de fautes d’orthographe, mais on ne leur apprend pas – ou que trop peu – à écrire.
Entretien réalisé le 05 décembre 2023.
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